Le pivot du Jazz sera, l’été prochain, après le contrat record signé avec Utah, le sportif français le mieux payé. A 24 ans seulement. Il n’a pas fini de grandir.

Son père a porté le maillot de l’équipe de France. Rudy Bourgarel (2,14 m ; 114 kg) qui fut l’un des grands espoirs du basket français dans les années 80 (au Stade Français, au Racing Paris, à Saint-Quentin et à Toulouse, notamment) a joué aux Etats-Unis, en NCAA, à Marist College, dans l’état de New York, dans l’ombre de Rick Smits (2,21 m qui filera, lui aux Indiana Pacers). Le rappel pour le service militaire le coupa alors dans son élan après deux saisons. Il ne sera finalement jamais drafté mais portera à 19 reprises le maillot de l’équipe de France (3,4 points de moyenne). Celui qui a laissé le souvenir d’un joueur mystérieux, timide, faisant, lors de ses grands jours, «penser à David Robinson» est retourné vivre en Guadeloupe peu après le troisième anniversaire de son fils, Rudy Gobert (du nom de sa mère Corinne).

Il est au cœur du «Temple du basket indoor» en France. A Aubervilliers, le pivot du Jazz a investi (avec Evan Fournier) dans la Hoops Factory un projet planté sur 2500 m2 organisant la location de terrains de basket (de 32 à 80€ l’heure, suivant qu’il s’agisse de demi terrain ou de terrain complet, d’heures creuses ou pleines). Pour des rencontres sur le mode NBA, en 3 contre 3 ou 5 contre 5. Avec à la sortie «des feuilles de statistiques pour tout savoir sur la partie disputée» résume le pivot français. Pour tout décortiquer et faire comme les pros, du décor au débrief’.

Rigaudeau, Bilba, De Colo, les racines de Cholet. Cholet, un vaste et fertile terrain de jeu. Comme Antoine Rigaudeau, Jim Bilba, Mickaël Gelabale, Rodrigue Beaubois, Kevin Seraphin ou Nando De Colo, Rudy Gobert a découvert l’univers professionnel à Cholet (1^er match professionnel en 2011) où la terre est réputée, au fil des années, pour ses produits talentueux. Des joueurs ambitieux, capables de déployer leurs ailes une fois la formation achevée.

Le modèle Parker. Avant même de signer son premier contrat professionnel, Tony Parker n’hésitait jamais à clamer haut et fort son ambition, vivre et briller en NBA. Dans un univers qui a peur de son ombre et fuit la pression, manie avec aisance la langue de bois, Rudy Gobert avance une assurance comparable au quadruple champion NBA, dénuée d’arrogance ou de prétention. Juste la certitude que les choses se feront, parce que le travail et l’ambition sauront se hisser à la hauteur. En temps et en heure. «A partir du moment où je suis arrivé à Cholet, à 15 ans, j’ai toujours été sûr que j’irais en NBA. Je voyais mon futur en NBA et en équipe de France. Je savais que j’y arriverais. Après, il fallait faire ce qu’il y avait à faire. Mais j’ai toujours su que j’y arriverais», a-t-il un jour raconté à Christophe Remise. Rudy Gobert a de plus la chance, comme TP, d’évoluer dans une franchise «familiale», propice à son épanouissement.

Mieux que Yao Ming. 57 cm à la naissance ; 1,85 m à 15 ans ; 2,15 m à 19 ans. Et 2,36 m d’envergure, le record en NBA (2,29 m pour Yao Ming). En NBA, Rudy Gobert faisait parler de lui avant même les premiers rebonds captés ou les contres dévastateurs claqués. Rudy Gobert, pivot délié capable de prendre ses jambes à son cou pour avaler le terrain et conclure une contre-attaque, a, enfant, essayé l’athlétisme, le karaté, le tennis de table, le judo et la boxe, avant de se diriger vers le basket. Pour porter, en NBA, le numéro 27, celui de sa draft, en 2013 (par les Denver Nuggets, avant d’être échangé). Le jour qui a changé une vie dans laquelle il aime glisser des parties de jeux vidéo. En 2015, durant la préparation de l’Euro en France, Boris Diaw avait, sur RMC, glissé : «Celui qui s’entraîne le plus, c’est Rudy Gobert. Je pense qu’il s’entraîne plus aux jeux vidéo qu’au basket.» Mais Gobert, sans bruit, a su, en Bleu aussi faire du poste, longtemps source de tourments, une place forte.

(Source : Le Figaro)