ITW Fabien Causeur : « Les fans veulent que ce soit : Baskonia à la vie, à la mort »
Fabien Causeur ne prendra pas part à l’Eurobasket avec l’Équipe de France en raison d’une blessure. L’arrière se confie et revient sur ses débuts à Vitoria.
Fabien Causeur est revenu pour nous sur son absence en équipe de France. L’arrière explique les raisons de son forfait et commente ses débuts avec Saski Baskonia, club avec lequel il a terminé deuxième de la saison régulière en Liga Endesa et atteint les quarts de Finale de l’Euroligue.
Tu rates le rassemblement des Bleus à cause d’une blessure. Encore une inflammation au niveau du pied ?
Ces deux derniers mois, avant chaque match, je devais faire une piqûre anti-inflammatoire. Et malgré la piqûre, ça continuait à me gêner énormément pendant les matchs. C’est une blessure qui traîne… C’est ce que j’ai dit à Vincent Collet. J’aurais pu venir et jouer encore sous infiltrations. Mais ça pouvait « péter » à tout moment. Et si ça pète, comme lorsque j’étais à Cholet, derrière c’est une absence de 5 mois… J’avoue, c’est un choix personnel. Je pense à moi. Mais c’est presque un choix par défaut. Je n’ai jamais refusé l’équipe de France avant. Même lorsqu’on m’avait appelé pour jouer les sparring-partners, j’étais venu sans rechigner. J’avais même été sélectionné au final. Je sais très bien que des gens ne vont pas comprendre…
Donc si tu n’avais pas été blessé, tu serais venu ?
Évidemment ! Il n’y a même pas discussion là-dessus. Le break va me faire du bien, tant au niveau de mon pied qu’au niveau mental. Ok, on s’est fait éliminer tôt, j’aurais peut-être pu avancer la date de mes infiltrations. Mais j’avais besoin de prendre un vrai break, de me retrouver avec ma famille en France. Je sais très bien qu’en équipe de France je vais progresser à l’entrainement et que je vais jouer des rencontres importantes. Après il faut se dire que je n’ai pas un rôle aussi important que d’autres… Même si je n’ai jamais refusé ce rôle ou que je m’en suis jamais plaint.
Vincent Collet ou tes coéquipiers, comme Ali Traore, n’ont pas essayé de te convaincre de revenir sur ta décision ?
Non, ils savent ce qu’il en est. Ali est très bien placé pour savoir puisqu’il a vécu cette situation. Après, oui, c’est sûr, là il fait le forcing. Mais il y a un risque niveau blessures. Et surtout, sur mon poste, cette année, il y a beaucoup de monde donc quand bien même j’y sois allé, je n’avais aucune assurance d’être pris à la fin. Puis bon, tout le monde le sait, Ali est spécial… Il aime le risque ! (rires)
Rafael Nadal a eu beaucoup de problèmes au pied. Finalement, il a trouvé une solution en utilisant des semelles spéciales.
J’ai le même docteur que Rafael Nadal à Vitoria ! (rires) C’est lui qui m’a fait mes infiltrations cet été. Le traitement que j’ai reçu au pied est celui que Nadal a eu au niveau du genou. Sinon j’ai un podologue qui me fait changer mes semelles toutes les trois semaines. Mes chaussures, dès qu’elles sont usées, je dois les changer. Mon jeu m’oblige à beaucoup forcer sur mes appuis du coup le fond de la semelle s’use vite. J’ai aussi beaucoup de soins après les entraînements. Voilà, ça fait partie de ma carrière et ça en fera toujours partie.
Tu passes de Cholet à Vitoria. Qu’est-ce que ça fait de se retrouver entre Nocioni et San Emeterio ?
Au début ça fait bizarre. Andres Nocioni a une grande carrière, San Emeterio aussi. Ils ont beaucoup de titres. Nemanja Bjelica, c’est le jeune prodige. Puis ce sont de super mecs. Ça se passe très bien, l’adaptation s’est bien déroulée et j’ai de bons contacts avec tout le monde donc je suis heureux là-bas.
Barcelone et le Real Madrid mis à part, que penses-tu du niveau de la Liga Endesa ?
C’est vraiment au-dessus de la Pro A. Je ne vais pas dire qu’aucune équipe française ne peut battre une équipe espagnole, mais tous les weekends tu dois te battre. Et pourtant, on avait une grosse équipe. On va à Murcia où l’on gagne de justesse sur la fin. Les équipes du bas de tableau sont vraiment très dures à aborder. Par exemple, à Fuenlabrada, dans la banlieue de Madrid, c’est vraiment très dur à y gagner. Ça m’a vraiment marqué. Il n’y a pas de match facile, tout le monde peut battre tout le monde. Après, il y a aussi le fait que nous jouions deux-trois matchs par semaine. En France, on va un peu plus vite. Mais techniquement et tactiquement, la Liga Endesa est au-dessus de la Pro A.
Est-ce que Thomas Heurtel t’a aidé à t’intégrer ?
Énormément ! Je suis arrivé sans parler un mot d’espagnol. Enfin si, j’avais mes bases scolaires. Mais bon… (rires) J’avais besoin de lui car les changements de clubs me stressent toujours un peu. J’ai un peu peur de ne pas bien m’adapter. Je lui ai posé beaucoup de questions pour qu’il me conseille. Il a vraiment été parfait avec moi, il m’a montré où aller dans la ville. Idem pour la communication. Dusko Ivanovic parle un très bon français mais pas les assistants; donc au début je ne comprenais pas très bien.
Le Pays basque, et plus particulièrement Vitoria, est une vraie terre de basket. tu as dû découvrir une sacrée ferveur.
Oui, c’était incroyable. Il y avait des matchs où c’était vraiment très chaud. Les gens sont géniaux, j’ai eu un très bon accueil. Je pense qu’ils aiment les gens qui travaillent, qui se donnent à fond sur le terrain. C’est un peu leur caractère. Même si tu n’es pas bon, tant que tu te donnes à fond, ils vont continuer à te soutenir. C’est motivant. Puis là-bas, tu ne peux pas te balader dans la rue sans te faire arrêter pour prendre des photos ou signer des autographes. Tout le monde sait qui tu es. Entre le basket et le club de football d’Alavés, ce sont des fous de sport.
Tu arrives à Vitoria où tu dois gagner ton temps de jeu et finalement tu termines dans le cinq de départ. C’est assez rare, surtout là-bas.
Je profite aussi des circonstances qui ont fait que Brad Oleson est parti. Après je prends ça comme une énorme marque de confiance de la part du club qui m’a donné ma chance. J’étais vraiment content. Au début de la saison, avec Dusko, j’étais derrière Brad. J’avais besoin d’un temps d’adaptation car le niveau là-bas, c’est quand même autre chose. En plus Brad m’a aidé en me donnant plein de petits conseils. Puis j’ai eu la « chance » qu’il parte et que le club me fasse confiance. J’ai eu des performances en dents de scie, ils attendent de moi que je sois plus régulier la saison prochaine.
Tu as le même profil qu’Oleson quand il est arrivé au club : un shooteur gaucher. Finalement il est devenu fort défenseur.
Je pense que c’est ce qu’ils cherchaient. Quand je suis arrivé, Dusko m’a clairement dit qu’il fallait que je travaille ma défense. C’est clair qu’aujourd’hui je ne suis pas le meilleur défenseur de la ligue mais je pense avoir progressé sur beaucoup d’aspects défensifs. Quand je suis arrivé je me suis tout de suite bien entendu avec Brad. C’était un très bon joueur qui m’a vraiment beaucoup appris.
La présence de Dusko Ivanovic t’a-t-elle influencé au moment de faire ton choix ?
Oui. Je voulais passer un cap. J’en avais besoin. Avec Dusko, j’étais sûr que j’allais morfler… Comme tout le monde (rires). J’en ai bavé. Puis il est parti à cause des mauvais résultats en Euroligue. On était presque éliminés, on a perdu contre un club du milieu de tableau en championnat. Les fans sifflaient. Je pense que le président a voulu faire un électrochoc. Après neuf ans de services, Dusko est parti. Je n’avais jamais eu un coach coupé en cours de saison. Ça m’a fait bizarre. Le match d’après on en prend quarante contre le Zalgiris… Derrière on fait dix-sept victoires de rang. Au final, ça a peut-être été un mal pour un bien. Mais je ne vais pas dire que j’étais content que Dusko parte car j’étais venu là pour lui. Puis le feeling avec Zan Tabak est très bien passé. Tabak mettait également de l’intensité dans le jeu mais il te laissait faire davantage d’erreurs avant de sortir.
Justement avec Zan Tabak, il y a eu une cassure révélée au grand jour avec le licenciement de Carlos Cabezas.
Ça, c’est un peu spécial… Même nous on ne connait pas le fin mot de l’histoire. On avait des doutes sur qui avait parlé dans la presse mais il n’a jamais avoué. Après on ne sait pas si c’est lui. Ça a choqué le groupe. Ça ne fait jamais plaisir de voir quelqu’un partir. Puis derrière on passe pour des « rigolos »… Ça a rendu les fans dingues, on s’est beaucoup fait siffler. Les fans veulent que ce soit « Baskonia à la vie, à la mort ». Alors là ça a vraiment fait mal au groupe.
Vous avez eu beaucoup de hauts et de bas. Vous allez battre Barcelone chez lui puis le trou…
On était une équipe un peu spéciale… On pouvait battre les tous meilleurs puis perdre contre le dernier. L’équipe était assez jeune malgré la présence des Nocioni ou San Emeterio. On avait des problèmes de concentration. Mais ça ne nous a pas empêché de faire les quarts d’Euroligue. Malheureusement ce problème nous a coûté très cher en play-offs.
Vous terminez par une élimination au premier tour des play-offs où ton adversaire direct, Ryan Toolson, prend complètement feu.
Ça m’a foutu les boules. Même si tout ce qui se passe avant compte, les gens retiennent surtout les play-offs. Mars-avril-mai j’ai été bon. Puis là, en juin, j’ai été mauvais. Et l’autre en face, il nous en plante presque 30… C’est un super joueur. Mais ça me fout les boules surtout qu’il les fait gagner. L’orgueil en prend un coup…
En Euroligue. Avez-vous été mis au courant du fait que le CSKA Moscou n’avait pas réservé d’hôtel pour un éventuel match 4 ?
On nous l’a dit à la fin du match 3. J’ai quand même du mal à y croire… Je me demande si ce n’était pas un truc monté de toute pièce par les journalistes. Le CSKA voyage en avion privé. Puis nous aussi quand on se déplace on n’a qu’un jeu de maillots. On les lave, c’est tout ! (rires) Bon ça nous a quand même bien motivé, on était énervés. Puis il y a ce match 4…
Un match 4 avec un scénario un peu spécial…
Si ça avait été « assez neutre », on aurait pu le gagner. L’arbitrage nous a fait mal. Il y a deux-trois techniques où franchement… Sur la fin, ça ne se joue à rien. Teodosic nous tue. En plus il fait retour en zone ! Il le sait, il regarde l’arbitre car avec le bordel dans la salle, il n’entendait plus rien. Il reste cinq secondes, il balance une prière et ça rentre… Ça fout les boules. Je ne dis pas qu’on aurait gagné à Moscou après. Honnêtement, on n’aurait sans doute pas gagné. Mais on méritait d’y aller…
Y a-t-il un joueur qui t’a impressionné cette saison ?
Il y en a pas mal. Quand tu joues Juan Carlos Navarro, c’est toujours spécial. Puis tu as l’autre aussi, là… Ryan Toolson… Et Vassilis Spanoulis en Euroligue. Spanoulis, c’est… comment dire… Spanoulis. En plus il joue sur mon poste alors j’en ai bouffé avec lui ! Mais bon, tout le monde prend avec lui (rires). Il est super fort et derrière il a les petits coups de sifflet qui l’aident aussi.
Scariolo a été nommé entraîneur. As-tu eu une conversation avec lui ?
Non, pas encore. Là j’ai rendez-vous à Vitoria pour passer des tests, je pense qu’on se verra à ce moment là. Avec Dusko ça avait été pareil. Je l’avais eu avant que je signe mais après j’avais dû attendre les tests pour lui parler à nouveau.
Omar Cook t’a parlé de Scariolo ?…
On en avait parlé pendant la saison. Je sais que ça s’était mal fini. Mais bon, le contexte à Milan était très particulier… Il ne m’a absolument pas dit que Scariolo était un mauvais coach. On dit beaucoup de choses. Par exemple, on m’avait dit que Dusko était un fou, qu’il blessait les joueur. C’est faux. Au basket, tout est une question de mental.
As-tu un exemple sur les entraînements avec Dusko Ivanovic ?
Lors de la pré-saison. On m’avait prévenu… On a fait deux semaines sans toucher le ballon. Un jour, on est partis courir à 8h du matin. On a fait le tour de la forêt pour s’échauffer. D’habitude je suis bon aux tests d’endurance. En France, j’étais toujours devant. Mais là… Tout le monde devait courir ensemble. Les grands, etc… Mais à un rythme… On était morts ! Et quand on a fini ça, Dusko a trouvé deux bouts de bois et les a posés à 100 mètres d’écarts. Il nous a dit : « vous allez fait quarante séries de sprints ». On s’est regardés… T’en fait 18-19, t’en peux plus. C’est un truc de fous ! Et sur la vingtième, Thomas Heurtel, qui arrive pourtant premier, relâche à quelques mètres de l’arrivée. Dusko est devenu fou ! Il a hurlé sur Thomas. Puis il nous a dit : « allez, on repart de zéro ». Et on a refait une série complète… J’ai mis 3-4 jours à m’en remettre. Avec Dusko, quand tu arrives à l’échauffement, il faut que tu sois déjà chaud. Il faut être à 200% tout le temps. Même quand il donne des exercices de dunks, ça ne rigole pas…
(Source : BasketActu.com)